PONTE DELL'ACCADEMIA Dès 1488, on trouve traces de débat sur la nécessité de construire de nouveaux ponts sur le Grand Canal, celui du Rialto étant le seul. Il faudra pourtant attendre le 19ème siècle. En 1823 le projet de l'architecte Giuseppe Salvadori échoue de peu. Des raisons esthétiques poussaient les " anti " à refuser de voir rompre la splendide suite des palais qui s'affichaient sur le canal. C'est finalement en 1852 que l'architecte anglais Alfredo Neville, spécialiste des ponts en fer, fait commencer les travaux qui dureront deux ans et demi pour relier les deux rives. Seulement 23 marches, c'était le deuxième pont sur le Grand Canal.. à Péage ! Trois ans plus tard, devant la gare, un pont semblable allait être construit. Mais les ponts en fer s'abîmaient rapidement à Venise. En outre sa faible hauteur était un handicap pour le passage des bateaux. Les travaux pour construire un nouveau pont de bois commencent le 10 décembre 1932 pour s'achever le 15 janvier 1933 : 35 jours ! Il devait être provisoire. Il est toujours là.

PONTE DELL'ACQUAVITA Vers le milieu du 19ème siècle, les problèmes de circulation se firent plus aigus à Venise. La construction de nouveaux ponts s'imposait. Plusieurs ponts en fer sortis des forges de l'ingénieur Collato furent installés : de construction rapide, de faible coût, ils permettaient de résoudre les problèmes de viabilité. Le ponte dell'Acquavita, construit en 1852, est l'un de ceux-ci. On trouvait à ses pieds la boutique d'Elia Giannazzi, un des 218 acquavitai ou cafetiers autorisés à Venise.

PONTE DELL'ANATOMIA Non loin de là, on construisit au milieu du 17ème siècle l'une des premières écoles d'anatomie humaine. Les superstitions et les préjugés de nature religieuse avait fait obstacle à la dissection des cadavres pendant des siècles. Il suffit de se rappeler les persécutions subies par Léonard de Vinci et le long oubli auquel fut soumis sa précieuse iconographie anatomique, restée inconnue de ses contemporains. Donnons crédit cependant à la République vénitienne, dès 1368, d'avoir fixé une période déterminée pendant laquelle la dissection des cadavres étaient autorisée dans les hôpitaux et couvents. L'ouverture du teatro anatomico di San Giacomo dell'Orio, imaginé par le médecin Alessandro Benedetti, deux siècles avant, put se réaliser en 1671, grâce à la générosité de Lorenzo Loredan.

PONTE DELL'ANCONETA Au 12ème siècle, on édifia ici un oratoire où les jeunes du quartier venait vénérer l'image de la Vierge : une petite icône, une anconeta. Pour élargir la voie, l'oratoire fut abattu en 1855.

PONTE DELL' ANGELO Voilà la légende que l'on trouve dans " Les Annales des Capucins ", raccontée par Zaccaria Boveri (vers 1600). Un avocat peu honnête habitait ici une maison et utilisait un singe pour les travaux domestiques. Un jour qu'il avait invité à dîner le père général des capucins, Matteo da Bascio, celui devina que le démon devait se cacher sous les traits du singe. Démasqué, le démon admit qu'il devait prendre possession de l'âme de l'avocat, en échange des services qu'il lui avait rendu. Matteo ordonna alors au démon de s'en aller dans les ténèbres. Le diable accepta, à condition de laisser trace de son passage dans la maison et pour cela s'enfuit pratiquant un trou dans le mur. Alors l'avocat repenti, transforma le trou en une niche accueillant la sculpture d'un ange. Et depuis des siècles, l'ange veille sur cette maison.

PONTE DELL'ARCO Trois hypothèses à l'origine du nom donné à ce pont. -Ce pourrait tout simplement être le premier pont à arche construit à Venise, pour permettre le passage des bateaux. Rappelons qu'à l'origine, pour permettre aux chevaux de circuler dans Venise, les ponts n'étaient que de simples planches de bois jetés d'une rive à l'autre des canaux, planches que l'on retirait pour permettre le passages des bateaux. -Les combats à l'arc étaient fréquents. C'étaient même à une certaine époque le mode de combat le plus répandu lors les batailles. Dans divers endroits de la ville, on avait installé des cibles pour permettre l'entraînement des tireurs. On peut donc aussi penser qu'une telle cible aurait été aménagée au voisinage du pont, appelé pour cette raison : pont à l'arc. -Mais si vous levez les yeux, vous verrez souvent dans Venise des arcs à plein cintre qui relient entre eux deux bâtiments, pour assurer leur consolidation. Quelques pas après avoir franchi le pont, vous verrez justement de tels arcs dans la calle degli Studi. Ne serait ce donc pas une troisième hypothèse plausible ?

PONTE DELL' ARSENALE L'actuel pont a été construit vers 1920, en reprenant les modèles de l'antique pont levis que l'on peut voir sur les tableaux de Guardi et de Canaletto. L'élagante simplicité du pont contraste avec l'entrée majestueuse de l'Arsenal, enrichie de ses deux lions en marbre. Il est désigné "pont de l'Arsenal ou du Paradis" pour nous rappeler les liens qui unissent Dante à l'Arsenal. A gauche, on rencontre deux petits ponts qui enjambent le rio de l'Arsenal et qui se nomment : pont de l'Enfer et pont du Purgatoire. Le mot arzana que Dante utilise pourrait dériver de argine, digue. L'arsenal étant un espace clos fermé par des digues. Il est plus vraisemblable qu'il vienne de l'arabe darsena , qui indique le lieu où l'on fabrique les navires. Ce fut le premier arsenal d'Europe, le plus grand. Il est certain que dès le 13ème siècle, on construisait à Venise des galères. On a coutume de dire que ce n'est pas Venise qui a fait l'Arsenal, mais l'Arsenal qui a fait Venise. Il y eut jusqu'à 15000 ouvriers, appelés arsenalotti. Ils étaient capable de construire un navire en une journée (plus précisément d'assembler les pièces préalablement préparées). On fait appel à eux pour les charpentes des églises et ce sont eux aussi qui construisirent celle du palais ducal. Considérés comme l'élites des artisans, ils jouissaient de privilèges, tels que des logements gratuits ou à très faible loyer. On peut lire sur une plaque de marbre à gauche de l'entrée les vers que Dante écrivit au chant XXI de l'Enfer de sa Divine Comédie : " Quale nell' Arzanà de Viniziani Bolle d'inverno la tenace pece…" dont voici la traduction : "Comme dans l'Arsenal des vénitiens, bout, en hiver la poix tenace pour calfater leurs navires avariés, qui ne peuvent plus naviguer…"

PONTE DELL' ARZERE Selon certains, quand la zone de Santa Marta, dans le quartier de Dorsoduro, aujourd'hui très peuplée n'était qu'une vaste étendue marécageuse, on édifia ici une digue pour contenir les eaux de la lagune. Sachant qu'en dialecte vénitien, arzere signifie argine, digue, nous aurions donc là l'origine de la dénomination de ce pont.

PONTE DELL'ASEO Un de ces ponts dont la dénomination appartient à la branche " commerciale " de la toponymie vénitienne . De même qu'il existe le pont du vin, de l'huile, du fromager, du teinturier, de la cire, celui est le pont du vinaigre. Aseo est en effet le mot du dialecte vénitien pour aceto, vinaigre .

PONTE DELL'AVOGARIA Sebastiano Zani, doge de 1172 à 1178, réunit trois avogadori, avocats, dans une magistratue appelée Avogaria, qui avait pour devoir des justifier les raisons du fisc. Plus tard l'Avogaria prit de plus en plus d'importance dans le domaine de la justice, devenant comparable aux tribunaux de l'antique Rome. C'est elle aussi qui décidait de l'inscription des nobles sur le fameux Livre d'Or.

PONTE DEI BARCAROLI De même que le mot vénitien pour fruttaiolo, marchand de fruit est : fruttarol ; pour erbaiolo, marchands d'herbes, c'est erbarol ; barcarol est le mot du dialecte pour barcaiolo, gondolier. Il y avait là une station de gondoles. En français la barcarolle est le chant des gondoliers, puis par extension, toute pièce musicale d'un rythme analogue.

PONTE DEI BARETERI Un des plus anciens ponts de Venise, qui tire son nom du fait que dès 1200, se trouvaient dans la zone de nombreuses boutiques où l'on fabriquait et vendait des barete, mot vénitien pour berreti, bérets, et plus généralement des couvre-chefs. En plein centre de Venise, c'est le point de rencontre très fréquenté de cinq calli dont la Merceria San Zulian qui conduit à Saint Marc, la Merceria del Capitello qui conduit au Rialto et le sottoportego delle Acque, célèbre pour abriter le Casino Venier. Un casino que l'on visite encore aujourd'hui et qui donne très bien l'idée de ce qu'étaient les casini et ridotti de Venise Les premiers ridotti étaient réservés aux nobles. Petit à petit fleurirent d'autres ridotti et casini où l'on jouait, dînait et riait beaucoup. En 1767, on n'en comptait pas moins de 136. Le goût des jeux d'argent gagna toutes les couches sociales. La seule règle étant d'y venir masqué. Le casino Venier, aujourd'hui siège de l'Alliance Française est un des lieux, où sans doute Casanova lui-même passa quelques soirées. On peut voir encore la porte dérobée par laquelle, en cas de nécessité, s'esquiver rapidement, le judas, ouverture percée à travers le sol, par lequel on pouvait observer les personnes entrant par le porche.

PONTE DELLE BALLOTTE C'est au voisinage de ce pont qu'on fabriquait les boules (ballotte) qui servait au Conseil Majeur pour l'élection des doges. On adopta en 1268 un système qui resta en vigueur jusqu'à la fin de la République, tellement compliqué qu'il en est invraisemblable. On introduisait dans une urne autant de boules qu'il y avait de membres dans le Conseil (au cours des siècles, ce nombre varia de quelques centaines à plus d'un millier). Un garçon, appelé ballotino, était choisi pour extraire les boules pendant toute la durée de l'élection. Un premier tirage désignait 30 membres. Parmi les 30, un deuxième tirage au sort en désignait 9. Ces neuf là procédait à l'élection de 40 membres. A nouveau le ballotino intervenait pour en choisir 12. Les 12 désignés devaient élire 25 membres parmi les plus jeune de l'assemblée. Toujours, selon le même système, un tirage au sort en désignait 9. Qui s'enfermait dans une pièce pour en désigner 45. 11 des 45 étaient tirés au sort, qui en élisaient 41. C'étaient finalement vrais électeurs du doge. Toutes ces précautions étaient prises car Venise avait une véritable hantise de la corruption (qui cependant ne pouvait être totalement écartée). Ce système diabolique voulait prévenir toute intrigue, écarter tout intérêt qui ne fut pas celui suprême de la République. C'est tout de même là un point positif qui mérite d'être noté. A noter que le mot français " ballotage " tire son origine de la ballotta.

PONTE DELLE BANDE Banda est le mot vénitien pour parapetto, parapet. Autrefois, aucun pont n'en avait. Celui-ci pourrait être le premier à avoir été construit avec un parapet. L'unique exemple à Venise qui reste aujourd'hui de pont sans parapet est le ponte Chiodo sur la fondamenta di San Felice.

PONTE DELLE BECARIE Capra, c'est la chèvre Caprone, le bouc, mot qui admet un synonyme : becco. Aujourd'hui encore on peut entendre dans la bouche d'un vénitien " andar dal becher " pour " andare dal macellaio " ; aller chez le boucher. Becaria désigne donc la boucherie, même si depuis longtemps l'on n'y vend plus de viande de bouc, autrefois largement consommée. Au 14ème siècle, on construisit en effet sur le campo voisin, non loin du pont du Rialto, les abattoirs publics. Les statistiques nous apprennent que vers 1550, époque à laquelle comptait 150000 habitants, on abattait dans les abattoirs 500 bœufs, 250 veaux par semaine, sans compter les poulets, les boucs, les porcs…

PONTE DELLE BECARIE Capra, c'est la chèvre Caprone, le bouc, mot qui admet un synonyme : becco. Aujourd'hui encore on peut entendre dans la bouche d'un vénitien " andar dal becher " pour " andare dal macellaio " ; aller chez le boucher. Becaria désigne donc la boucherie, même si depuis longtemps l'on n'y vend plus de viande de bouc, autrefois largement consommée. Au 14ème siècle, on construisit en effet sur le campo voisin, non loin du pont du Rialto, les abattoirs publics. Les statistiques nous apprennent que vers 1550, époque à laquelle comptait 150000 habitants, on abattait dans les abattoirs 500 bœufs, 250 veaux par semaine, sans compter les poulets, les boucs, les porcs…

PONTE DEI CALEGHERI Calegher est le mot vénitien pour calzolaio, cordonnier. En 1773, on comptait 340 boutiques employant 1162 personnes. Chaque boutique devait offrir chaque année une paire de sabots à la dogaresse. On devait cependant distinguer entre les calegheri, fabricant de chaussures raffinées et les zavateri, qui se contentaient de rapiécer les vieilles chaussures et de fabriquer des savates.

PONTE DEI CONZAFELZI La felze était l'habitacle caractéristique aujourd'hui disparu des gondoles. Elle protégiat à la fois des intempéries et des regards indiscrets. Le mot felze dérive de felce qui désigne la fougère, car à l'origine, pour se protéger du soleil on se contentait d'étendre des branches de fougère au dessus de la tête de qui se trouvait en gondole. La décoration excessive des gondoles préoccupa bientôt la magistrature aux Pompes, qui profita d'une épidémie de peste pour décréter que désormais la felze devait disparaître et que toutes les gondoles seraient peintes en noir, en signe de deuil. Conzar est le mot du dialecte vénitien pour accomodare (arranger). Les conzafelzi étaient donc les employés chargés de construire et décorer les felzi sur les gondoles. On compta jusqu'à près de dix mille gondoles, nombre énorme !

PONTE DELLA CALCINA Passaient autrefois sous ce pont les barques chargées de chaux (calce) et de pierres destinées aux constructions. Les calcinieri avaient leurs magasins tout le long du rio di SanVio. John Ruskin, auteur de l'ouvrage " Les pierres de Venise " séjourna à la pension Calcina.

PONTE DELLA CERARIA La cire était importée d'Orient et de la Roumanie. On comptait dans la Venise du 16ème siècle au moins 24 ateliers où la cire était traitée puis transformée en chandelles. Ces ateliers étaient les cererie. Plus tard, on en fit également différents objets de décoration et l'on peut lire dans la Gazette de Venise de 1760 qu'un certain Giambattista Talamini, entouré de ses élèves produisaient dans sa boutique de gracieux figures, plantes et animaux de cire.

PONTE CORRENTE On appelait autrefois calli correnti (rues courantes), celles qui étant longues et droites " couraient " directement d'un point à un autre de la cité , se distinguant de la majeure partie des ruelles qui étaient tortueuses. Une seule calle a conservé cette ancienne dénomination dans les alentours de Santa Sofia.

PONTE DELLE CAVANE Quatre ponts sont désignés ainsi. La cavana est l'espace aquatique, généralement couvert où sont rangés les barques, autrement dit le garage pour barques. Dans certains cas, l'ouverture d'une cavana, où doivent s'introduire des bateaux de bonnes dimensions détermine l'interruption d'un quai et par conséquent la nécessité de la construction d'un pont.

PONTE DELLE COLONNE Un des plus vieux ponts, des moins fréquentés, qui mérite pourtant le détour. Entouré d'un atmosphère mystérieuse ; Des deux colonnes qui soutenaient le portique, une seule reste intacte.

PONTE DELLE CONVERTITE Vers 1550,une initiative trouve sa réalisation : l'institution des Convertite à la Giudecca où l'on transféra les prostituées repenties des Incurables. On enregistra de graves désordres les premières années, un des premiers recteurs étant condamné à mort en 1561 parce qu'il avait abusé au moins de vingt pensionnaires. Le climat s'apaisa et l'on compta jusqu'à 400 pensionnaires. L'institut abrita une imprimerie renommée. Dédié à la prévention de la prostitution, fut crée l'institut des Zitelle, toujours à la Giudecca. On y accueillait des jeunes filles de 12 à 18 ans, belles et pauvres et pour cela sous la menace d'être contraintes à se prostituer. Elles y restaient jusqu'au mariage ou à l'entrée dans les ordres, à moins qu'elles restent à l'institut pour devenir éducatrices des plus jeunes. La réglementation était sévère mais, en compensation, les filles étaient à l'abri des difficultés de la vie. Elles avaient la possibilité d'apprendre à lire, à écrire, à chanter, à apprendre l'art de la dentelle, de l'économie domestique, de l'horticulture… Quant aux édifices des Convertite, à la Giudecca, ils furent transformées en prison pour femmes, toujours en activité aujourd'hui